KröniK | Monkey3 - Sphere (2019)


Larguant au fil du temps les amarres du stoner pour accoster les rivages d'un (post) metal plus évolutif quoique toujours aussi dynamique et instrumental, Monkey3 a su façonner une identité aussi affirmée qu'attachante qui finalement n'appartient qu'à lui. En presque vingt ans de carrière, les Suisses se sont logiquement imposés parmi les mètre-étalons d'un rock à la fois accrocheur et planant duquel le chant est éconduit. En rejoignant en 2013 l'écurie Napalm Records à l'occasion de The 5th Sun, le quatuor a même encore accru sa visibilité, gagnant un succès amplement justifié que le plus décevant Astral Symmetry, gravé trois ans plus tard, n'a pas vraiment réussi à entamer. Malgré cette relative baisse d'inspiration, nous étions donc nombreux à attendre son sixième album.  Le voici. Certains verront peut-être Sphere comme un  retour aux sources ; nous préférons voir en lui au contraire le prolongement du style aérien et moelleux à l'œuvre depuis "The 5th Sun". Deux gigantesques sentinelles bordent son menu trapu. La première d'entre elles, 'Spirals' résume la signature du groupe, étirant sur plus de onze minutes élégantes et soyeuses un rock atmosphérique dont la beauté spatiale ne peut qu'évoquer le Pink  Floyd de Wish You Were Here ou Animals avec un soupçon de Meddle, référence obligée dès que les guitares décollent très haut. Après une longue entame aux couleurs stellaires, la piste s'éveille peu à peu au rythme de percussions qui grignotent de plus en plus l'espace, avant d'être définitivement lancée. Ses traits se durcissent tandis que la six-cordes stratosphérique de Boris rivalise avec les claviers ondoyants de DB. Le titre file tranquillement vers une conclusion aux allures d'apothéose.


A l'autre bout lui répond 'Ellipsis'. 14 minutes au garrot pour une véritable leçon de montée en puissance orgasmique. Basse gourmande, batterie au groove hypnotique, synthés venus des étoiles et guitare pointillistes se rejoignent progressivement en un ballet spatial capiteux. D'ailleurs, à l'écoute de ce pavé, on mesure combien chaque musicien tient ici sa place dans un ensemble délicat dont la belle liberté de traits trahit en réalité un travail millimétré.  Entre ces deux monuments se glissent quatre compos au format plus ramassé, exception faite de 'Prism' dont la puissance émotionnelle et la qualité supérieure lui confèrent un rôle de pivot, épicentre d'un tsunami de beauté. Là encore, ces neuf minutes offrent aux Suisses l'occasion de démontrer leur science l'élévation cataclysmique couplée à une construction d'orfèvres. Derrière ses fûts, Walter imprime une énergie ravageuse, que drapent de fantomatiques nappes électroniques. Piloté une guitare gavée de feeling, le final ne peut que tirer des larmes. Plus court, le reste n'en est pas pour autant anecdotique, entre un 'Axis' également floydien, un 'Ida' aussi rêveur que chaloupé et surtout ce 'Mass' aux accents plus d'espérés qui répand une emphase sombre et envoûtante. Dans la continuité de ses récents aînés, Sphere affirme la signature de plus en plus progressive de Monkey3 dont il constitue certainement l'œuvre la plus forte. Et donc la plus belle.  (30.06.2019 | MW) ⍖⍖⍖⍖



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