Etonnamment, il existe une vraie tradition dépressive italienne, née avec les offrandes séminales de Forgotten Tomb ou de Tenebrae In Perpetuum, expression cryptique et parfois hivernale d'un Black Metal doloriste, que leurs nombreux héritiers continuent toujours d'exploiter, souvent avec un certain bonheur (si l'on peut dire). Ce split de très bonne facture donne la parole à deux d'entre eux, Vidhar et ..., qu'accompagne le groupe international Dead. Découvert quelques années auparavant grâce à une démo (Suffering Existence) et un EP (Somebody Save Me) extrêmement prometteurs, ... est celui-ci qui confère à l'ensemble une bonne part de sa valeur ajoutée. La participation de ce qui est encore alors un duo entre les quatre mains du chanteur Lettalis et du guitariste (hollandais d'ailleurs) simplement nommé S., n'est pourtant ni la plus longue ni la plus suicidaire.
Il se dégage cependant de ces deux complaintes un désespoir sans fin, un sentiment d'inexorabilité qui les rendent bouleversantes. Si la première d'entre-elle, "Cytostaticum" lorgne vers un art noir aux confins du shoeagaze, "Explorating Secret Hideaways Of The Mind Through Apaty" prend la forme d'une piste instrumentale et minimaliste dont les notes grêles, suintant la solitude et la résignation, évoquent le fantôme du Burzum carcéral dont les deux musiciens ne sont alors pas loin d'égaler le sens de la tristesse désolée. A cette paire de gemmes noirs, succèdent la double contribution de Dead. Le registre est différent, plus black metal sans doute. Du haut de ses douze minutes au jus, "Mental Disorders" bouillonne d'une négativité brutale tandis que "Sociopath" a quelque chose d'une lente et malsaine rumination qui engourdit peu à peu les sens. Chant écorché, son pollué et grésillant, tout cela possède un goût prononcé de réchauffé mais le masochiste en quête d'une solide corde y trouvera sans aucun doute matière à cultiver son mal-être. Retour dans la péninsule italienne avec Vidharr, groupe de la guitariste (et chanteuse) Serena Mastracco (Riti Occulti), qui ferme le cercueil avec trois titres de facture tranchante, presque accrocheuse, témoin "Within Phantasmagorical Patterns" que sillonnent ces lignes finalement des plus mélodiques. C'est très bien fait mais tranche toutefois par un déficit de noirceur avec les mortifications précédentes, quand bien même "Void" dévie en cours de route de sa trajectoire première pour sombrer dans des méandres funéraires cependant que "Processed" possède une ouverture riche en promesses mélancoliques, malheureusement balayées ensuite par un tempo qui s'emballe, lequel ne réussit pourtant pas tout à fait à lui ôter son triste éclat. Cold Journey Through Madness explore trois manières différentes de cultiver le black dépressif. Laquelle préférerez-vous ? (2014) ⍖⍖
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