L'entretien | For Ruin (02/2010)


Bonjour John. For Ruin a débuté comme un simple projet solo. Peux-tu évoquer ces débuts et notamment le split avec Meiche ?

Hey ! merci pour cette interview ! Oui, initialement ça l'était mais ce n'était pas vraiment prévu. La démo avec Meiche est un projet réunissant deux fans de black metal que j'ai fait avec un ami en 2003. J'ai joué de la batterie, des guitares et des claviers sur la partie de Meiche. Il m'a aidé un peu sur quelques titres de For Ruin et nous avons décidé de produire un Split et de mettre les deux groupes de manière à avoir des styles très contrastés. Les titres de For Ruin sont parmi les tous premiers que j'ai écrits et enregistrés, certains remontent à 1997/1998 peut-être. Meiche n'a rien fait depuis, et je doute qu'il refasse quelque chose. Ca été un bon moment. Mais c’était il y a bien longtemps maintenant ! Je terminais un doctorat à l'université pendant que j'enregistrais la première démo donc je n'avais pas beaucoup de temps pour travailler sur ce disque, seulement à la fin de semaine.

Comment as-tu découvert le black metal ?

Chacun de nous dans For Ruin écoute depuis de nombreuses années du metal extrême (et d'autres formes de métal et de musique). Quant à moi, quand j'étais plus jeune, j'ai toujours écouté de la musique basée sur la guitare, des groupes comme Dire Straits, Iron Maiden, Thin Lizzy, etc ont été important pour moi. J'ai aussi beaucoup écouté le grand guitariste irlandais Rory Gallagher. La musique que j'aimais toujours un côté assez dur et je pense que j'ai suivi un chemin semblable à beaucoup de gens en m'intéressant ensuite à des groupes de thrash ayant un effet sur moi. Puis j'ai commencé à écouter Celtic Frost et des choses plus extrêmes, ce qui mène naturellement vers les groupes qui nous influencent le plus aujourd'hui. J'ai toujours préféré la musique sombre qui a cependant un sens aigu de la mélodie plutôt que la vitesse et l'agressivité ce qui, je pense, transparaît dans les compos de For Ruin sur December, notre premier album de 2007, et aussi sur le nouvel album Last Light.

Que signifie le genre pour toi ?

Je ne passe pas beaucoup de temps à réfléchir sur les noms des genres et des étiquettes que les gens mettent sur les groupes.C'est juste du metal pour moi, certains d'entre eux sont bons à mon goût, d'autres sont de la merde. Je trouve le côté sombre du Back metal attrayant. Notre groupe n'est pas politique mais chacun de nous dans le groupe est athée et j'ai personnellement une forte aversion pour la foi catholique dans laquelle j'ai été élevé. Je partage donc avec le Black Metal un sentiment de dégoût pour cette foi. Mais plus important encore, c'est un style de musique que j'aime écouter et que je joue avec passion. C'est une partie essentielle de ma vie depuis longtemps.



Comment décrirais-tu votre musique ? Pour moi, For Ruin pratique un black metal avec des influences death...

Oui je suis plutôt d'accord. Nous sommes tous des fans de metal extrême mais aussi des amateurs de mélodies fortes et de chansons qui collent dans votre esprit; les plus mémorisables sont toujours les meilleurs. Je voudrais que l’on nous décrive comme un groupe de metal extrême, avec un côté mélodique. Les gens peuvent utiliser des catégories s'ils le souhaitent, ça ne me dérange pas. Nous ne sonnons pas comme les autres groupes de metal irlandais, que le public international peut connaitre. Nous avons plus en commun avec les groupes des pays scandinaves ou les styles méditerranéens de métal extrême.

Je trouve effectivement For Ruin très différent des autres formations irlandaises.

Oui, je suis 100% d'accord. Il existe quelques groupes de metal irlandais bien connus que les gens connaissent et nous n’avons certainement pas le même son, comme je l'ai mentionné plus haut, nous sonnons comme si nous venions d’un endroit différent. Je ne suis pas un fan des styles joués par les groupes les plus connus d'Irlande vraiment, même si j'aime Primordial maintenant plus qu'il y a dix ans, c'est vraiment un grand groupe (et des gars très sympas) et ils ont vécu toutes les difficultés que beaucoup de groupes ont connues et auxquelles on doit tous faire face.

Parlons maintenant de votre dernier album, Last Light. Sa pochette représente une croix. La religion est-elle un sujet important pour vous ?

En terme de paroles, pas vraiment et ça ne l‘était pas non plus avant. Je suis personnellement contre la religion que je considère comme étant à l’origine de nombreux problèmes dans le monde. Sur le dernier album Last Light, nous avons une chanson intitulée "In Suffering", qui s'inspire à la fois des crimes dégoûtants et blessants commis par l'Église catholique envers les enfants sous leur garde dans l'histoire irlandaise récente et aussi de mon aversion générale pour toute sorte de religion . L’artwork de Last Light montre une croix en décomposition, c'est un logo qui est inspiré par l’emblème des Christian Brothers. C’est notre version montrant une croix fragmentés et étranglée. Nous voulions une pochette simple et emblématique et c'est ce que nous avons eu.




Quels sont les thèmes abordés par For Ruin ?

Je suis le seul à écrire des paroles dans le groupe pour le moment (espérons que cela changera un jour) et celles-ci proviennent de mes influences, d'expériences et de mes opinions. Je n'écris pas sur des films d'horreur/gore, des trucs sataniques ou les conneries comme ça, il y a assez d'horreur dans le monde autour de nous. Les paroles de Last Light repose sur une gamme de sujets allant du fait de vieillir à la perte de la liberté, le climat, les méfaits de la religion catholique
Quant à l'inspiration, ce n'est pas quelque chose de tangible, ni de facile à identifier, mais pour moi personnellement, je puise mon inspiration dans mon entourage, ma vie et ma famille, les loisirs, ce que j'aime lire et écouter. J'ai passé pas mal de temps dans l'éducation et ainsi ma vie professionnelle influe également sur moi (et à son tour sur notre musique) dans une certaine mesure.
Le moteur pour le groupe vient de l'amour d'un style de musique que nous apprécions tous et dans le fait de voir les autres apprécier notre musique. C'est aussi un facteur. En fin de compte si personne n'aimait notre musique, on jouerai encore pour nous même, pour notre plaisir. Mais le fait que d'autres apprécient est encourageant et motivant. Avant, je ne pouvait compter que sur moi même pour pousser le groupe vers l'avant mais maintenant nous sommes à quatre à être derrière For Ruin.


Les nouveaux morceaux semblent plus courts et plus heavy que les vieux titres. Quelles différences vois-tu entre December, l'opus précédent, et le dernier ?

Oui, je pense que les nouveaux morceaux sur Last Light sont un peu plus courts dans certains cas et ils sont certainement plus lourds pour la plupart, plus rapides. Les chansons doivent être accrocheuses. C'est encore plus vrai aujourd'hui. Une nouvelle chanson n'a pas beaucoup de temps pour plaire avant que le public ne s'en désintéresse. Nous avons quelques morceaux plus longs sur nos vieux albums et nous en ferons d’autres à l'avenir. Mais la longueur n'est pas si importante, je pense. Ce qui est important est de frapper rapidement . Il y a tant de différences entre December et Last Light, principalement la production à mon avis, ainsi que le professionnalisme et l'unité du groupe. Nous sommes de meilleurs musiciens maintenant, plus âgés et plus sages, je suppose. Last Light a reçu toute l'attention qu'il mérite à tous les égards, ce qui n'était pas le cas avec le premier album pour une variété de raisons.

Parle-nous de "Crawl", ce titre instrumental.

J'ai toujours écrit des chansons instrumentales, avant que For Ruin ne se forme en fait. Sur le split avec Meiche, on trouve une longue pièce instrumentale et doomy, avec une construction très lente baptisée "Treading". Ce titre a été ré-enregistré pour la troisième démo, Obsidian. Cette seconde version est d'ailleurs bien supérieure. La démo Shade possède elle aussi une chanson de ce genre à la guitare acoustique que j'ai écrite il y a de nombreuses années. Je pense que pour moi toutes les chansons commencent comme des instrumentaux, j'écris toujours la musique d'abord et puis je pense à eux en termes de paroles, pour voir si elles fonctionnent ou pas. "Crawl" est un changement pour nous en termes d'instrumentaux. C'est probablement le morceau le plus rapide que nous avons écrit (avec "Deluge" peut-être) et il a une section très différente au milieu qui évoque un peu le Sepultura époque Arise. C'est une bonne chanson à jouer sur scène.

Tu es le leader du groupe. For Ruin est-il un groupe démocratique ?

Absolument. Nous ne faisons pas quelque chose sans en discuter d'abord entre nous et l'opinion de chacun est entendue. C'est la seule façon de faire des choses pour garder tout le monde ensemble, et derrière le groupe. Je ne voudrais pas être responsable de toutes les décisions et c'est agréable de partager les succès du groupe entre nous quatre quand on prend les décisions ensemble.

Comment se porte la scène extrême irlandaise ? Peux-tu nous conseiller quelques groupes ?

Je ne dirais pas que l'Irlande est un endroit génial pour un groupe de metal. Il y a beaucoup de fans de métal (occasionnels ou non) en Irlande. Metallica joue ici chaque année dans des festivals. Mais la scène "underground" est beaucoup plus petite, avec une fan-base de moins de 1000 personnes, je dirais. Les festivals connaissent des difficultés à cause de la récession qui a frappé l'Irlande, d'une manière plus importante que d'autres pays européens. Les chiffres sont en baisse pour les concerts et les magasins de disques disparaissent. L'entreprise est en panne. Cela devient de plus en plus difficile de faire des albums en Irlande ou partout ailleurs. Mais il y a un noyau de fans fidèles en Irlande mais eux aussi ont des revenus plus faibles pour le moment.

Il y a des groupes qui marchent en Irlande, même à l'intérieur de la scène extrême, et certains sont maintenant assez bien connus à l'étranger. J'ai l'impression que les groupes irlandais semblent étranges pour de nombreuses personnes. Du metal venant d'une île au nord-ouest de l'Europe est une curiosité pour beaucoup de fans internationaux qui ne connaissent de l'Irlande qu'une une série de clichés et U2. Nous avons trop de concerts par ici pour le moment, avec trop de groupes de merde. Les fans sont fatigués de les voir jouer semaine après semaine, de sorte qu'ils sont sélectifs, et ils ont raison. Cork a réellement souffert de cela, et Dublin aussi (bien qu'il y ait plus de public à Dublin). Être un groupe de métal en Irlande peut être très difficile. Il y a une pénurie de musiciens, de lieux pour jouer, et la scène est très petite. Toutefois, des groupes uniques tels que Primordial, Mael Mórdha et quelques autres se sont imposés. Finalement, notre isolement maintient la scène à l'écart des modes. L'Irlande présente donc des avantages et des inconvénients comme tout autre pays. Par manque de logistique, il est évidemment coûteux et peu aisé de jouer ici. Néanmoins, le pays a toujours eu une tradition musicale très forte qu'on retrouve dans le metal.

Quels sont vos projets immédiats ? Aimeriez-vous venir jouer en France ?

À l'heure actuelle, nous travaillons sur quelques dates de la tournée du Royaume-Uni pour le printemps et faisons beaucoup de promo et d'interviews. Nous espérons pouvoir jouer dans quelques festivals. Nous étudions des possibilités d'octroi de licences auprès de label pour mieux diffuser Last Light. Mais c'est agréable d'avoir tout cela sous notre propre contrôle. Nous espérons mettre en place quelques dates en Europe plus tard dans l'année (y compris en France!), Mais un certain nombre de choses doivent tout d'abord se mettre en place pour cela. Nous répétons certaines chansons du nouvel album que nous avons encore à jouer en répétition et nous travaillons sur de nouvelles chansons. Je suppose que nous allons écrire un peu plus au cours de l'année 2010 et enregistrer fin 2010 ou début 2011.
Mais nous avons beaucoup de travail à faire pour rehausser la stature du groupe au niveau international. Pour cela, il nous faut faire plus de concerts en dehors de l'Irlande. Les détails complets de l'ensemble de nos tournées sont sur www.forruin.com et c'est là que les gens peuvent nous soutenir et acheter notre musique. Nous faisons ceci en toute indépendance, sans le support des labels. Nous avons besoin de l'appui de tous les fans pour continuer à avancer. L'album est disponible en téléchargement gratuit sur le site internet et certaines chansons sont aussi sur notre Myspace à l'adresse www.myspace.com/forruinband.

Une dernière question pour terminer à propos de tes études, si cela ne dérange pas. Apparemment, tu possède un doctorat ?

En règle générale, je préfère laisser mes études en dehors de la vie du groupe (même si je suppose que cela a une influence quelque part ...) mais oui, j'ai étudié cinq ans pour obtenir un diplôme en physique appliquée et puis 4 ans pour obtenir un doctorat en physique. Ma profession est encore dans ce domaine high-tech et je l'apprécie beaucoup, il me pousse intellectuellement à être actif et je suis toujours à apprendre de nouvelles choses. Je ne pense pas ce soit rare de rencontrer des métalleux dans l'enseignement supérieur et dans des trucs high-tech. (Entretien réalisé pour MW)

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