CinéZone | Wolfgang Petersen - Dans la ligne de mire (1993)


Dans la ligne de mire demeure à ce jour et avant Une nouvelle chance, le dernier film dans lequel Clint Eastwood joue sans être aussi derrière la caméra. Castle Rock lui propose de cumuler les deux fonctions comme il en a l’habitude mais le cinéaste ne souhaite pas réaliser celui-ci, car il sait qu’il ne pourra pas le diriger tout en se chargeant de la post-production de Impitoyable, d’autant plus que son rôle nécessite sa présence constante sur le plateau. Admirateur du Bateau et de Troubles, il confie donc la mise en scène à Wolfgang Petersen. Conduit de main de maître par le réalisateur allemand et bénéficiant de la sublime et poignante partition de Ennio Morricone, Dans la ligne de mire se révèle passionnant de bout en bout. Ce qui le rend si palpitant, ce n’est pas à une accumulation de scènes d’action stériles qu’il le doit, mais à l’affrontement entre deux fortes personnalités qui constitue le moteur de l’histoire : d’un côté le garde du corps, un homme vieillissant qui n’a pu empêcher l’assassinat de Kennedy en 1963 et de l’autre, le tueur, intelligent et machiavélique dont le seul but est d’exécuter l’actuel président des Etats-Unis. Formés tous les deux par le gouvernement, ils représentent les deux faces d’une même pièce. Le récit s’organise donc autour de ce subtil jeu du chat et de la souris, égrenant un suspense croissant qui culmine durant les dernières scènes en Californie. 

Le film tire bien sûr sa grande force de ses deux interprètes principaux. John Malkovich, habitué aux rôles troubles et subtils (sa composition dans Les liaisons dangereuses est encore dans toutes les mémoires), est pour le moins impressionnant dans la peau de Mitch Leary. Surtout, il s’accorde admirablement bien avec Clint Eastwood, dont le personnage, Frank Horrigan, s’avère être une des plus magistrales interprétation. Eastwood s’est littéralement approprié le rôle au point qu’on pourrait croire qu’il a été écrit pour lui. En effet, Horrigan est un héros selon son cœur : nonobstant une réelle dimension héroïque, cet agent des services secrets apparaît comme un être vulnérable, jugé fini par ses pairs, en quête de rédemption et hanté par une faute qu’il a commise (il s’attribue la mort de Kennedy). Le comédien poursuit également à travers ce film le thème du vieillissement de son personnage. Avec courage, il se montre fatigué, peinant à courir à côté de la limousine présidentielle. De fait, Clint parvient à fragiliser ce héros magnifique transformant ce qui n’aurait pu être qu’un banal film d’action en un thriller psychologique teinté d’une dimension émotionnelle et dramatique certaine. Même s’il ne tire jamais la couverture à lui (ce qu’il n’a jamais fait), Eastwood offre une composition éblouissante et démontre encore une fois son immense talent que beaucoup ont trop longtemps jugé limité. Faire peu n’est pas rien faire ! Avec des carrières aussi différentes, on ne s’attend pas forcément à rencontrer Clint Eastwood et John Malkovich à l’affiche d’un même film. Pourtant, force est de reconnaître que leur rencontre tient toutes ses promesses, et sans eux Dans la ligne de mire n’aurait sans doute pas été aussi réussi. En outre le film, très documenté, nous fait pénétrer dans les arcanes de la protection du président des Etats-Unis, prouvant le souci d’authenticité qui anime Wolfgang Petersen. Toutefois sans vouloir minimiser le talent de ce dernier, il faut admettre que, de part son sujet et son personnage principal qui s’inscrivent parfaitement dans l’œuvre de l’acteur, Dans la ligne de mire, porte d’une manière indéniable la griffe de Clint Eastwood. Après le monumental Impitoyable sorti l’année précédente, le film confirme le retour de Eastwood au box-office en rapportant plus de 100 millions de dollars de recette sur le continent américain. (28.11.2016) ⍖⍖⍖⍖





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