KröniK | Mournful Congregation - The Exuviae Of Gods - Part I (2022)


Attention, là on touche à quelque chose de culte car Mournful Congregation n'est définitivement pas un groupe comme les autres, patriarche et figure tutélaire du funeral doom dont chaque nouvelle hostie est guettée, attendue comme un Graal doloriste. D'autant plus que la lenteur de la cadence à laquelle les Australiens forgent des albums n'a d'égale que l'agonie immobile de leur musique dont prétendre qu'elle est pétrifiée tient du doux euphémisme. Le quintet d'Adélaïde prend donc son temps, avare d'une semence plus triste que suicidaire, plus mélancolique que dépressive. Cinq opus longue durée en presque trente ans de carrière, c'est peu. Et c'est dire aussi combien le réveil de Mournful Congregation est à chaque fois accueilli avec une joie immense, si tant est que l'on puisse évoquer un tel sentiment euphorique à l'égard d'une partition dont toute trace de gaieté est éconduite. De fait, quand Damon Good et ses quatre compères offrent un nouveau signe de vie (ou de mort ?), on se tait et on écoute religieusement le prêche aux allures de leçon, celle d'un doom funéraire éternel qui impose le respect dès les premières notes expulsées depuis les arcanes de la terre, résonnant comme des ondes sismiques faisant trembler les fondations de cités souterraines millénaires. Leurs albums se font rares (le dernier, The Incubus Of Karma, date de 2018) mais ces musiciens des antipodes aiment heureusement rompre ce silence par des EPs qui n'ont en vérité de petit que le nom. Taquins comme autrefois Reverend Bizarre mais sans aller aussi loin que les Finlandais capables de proposer un EP de 70 minutes (!), les Australiens ne descendent ainsi jamais en-dessous de la demi-heure lorsqu'ils accouchent de ce type de création censée être trapue. Comment de toute façon pourrait-il en être autrement avec des compositions qui toutes - ou presque - franchissent la barre des dix minutes au compteur ? 


Première partie d'un diptyque dont le second chapitre est annoncé pour la fin de l'année, The Exuviae Of Gods - Part I se présente donc comme un mini-album bien qu'il étale sa souffrance durant plus de trente-sept minutes ! Trois pistes en garnissent le menu. La dernière n'est pas inédite, réinterprétation de 'An Epic Dream Of Desire', initialement gravée en 1995 pour la démo éponyme. Cette nouvelle version se veut évidemment plus propre, plus lisse, dégraissée de la saleté cendreuse qui enrobait l'original, démo oblige, sans pour autant gommer l'influence du UK doom qui coule dans ses veines meurtries. Plus intéressant demeure en revanche 'The Exuviae Of Gods', instrumental d'une pureté d'airain dont les notes de guitares, acoustiques ou aériennes, sont belles comme un chat qui dort. Et que dire de 'Mountainous Of Shadows, Cast Through Time', cathédrale qui, du haut de son quart d'heure prisonnier d'une rocailleuse gangue de tristesse, se dresse dans toute sa magnificence douloureuse et émotionnelle. Plus que jamais maître de ce funeral doom massif qui invite à la contrition, le groupe signe là un véritable modèle du genre, procession engourdie par une inexorabilité profonde, que creusent ces vocalises telluriques mais dont le monolithisme est toujours brisé par des lignes de six-cordes gorgées d'une beauté tragique, câbles à haute tension poussant cette pièce épique vers des cieux inaccessibles. Bouleversant. Après quatre ans de disette discographique, Mournful Congregation se déleste d'un EP fidèle à sa légende, sans doute pas suffisamment touffu, que les doomeux sauront apprécier à sa juste (dé)mesure... Complété d'un second pan qui permettra alors de le contempler dans sa totalité funèbre, The Exuviae Of Gods devrait ériger un puissant bloc de désespoir, dramatique et sévère. (10.07.2022 | MW) ⍖⍖⍖
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