KröniK | Monolithe - I (2003)


Bien que le format court lui sied également, c’est par le biais de titres longs et souvent interminables pour 99 % de la population mondiale que le Doom prend réellement toute sa puissance, toute sa dimension granitique, celle d’un granite noir et figé que seuls des artistes intègres et sincères peuvent réussir à tailler. Mais rares sont ceux à avoir tenter de relever le défi de composer un seul et long morceau de près d’une heure. Enfanter un très long morceau orphelin n’est pas en soi quelque chose de difficile, car il n’est pas compliqué de répéter à l’infini un même motif (qui peut confiner à une transe recherchée volontairement) ou d’assembler au petit bonheur des fragments de chansons ; c’est écrire un long et BON morceau, architecturé avec rigueur, équilibré et passionnant, qu’il l’est bien davantage.  Le très mainstream Skepticism y est parvenu avec son mini Aes ne comprenant qu’une unique plage de plus de 27 minutes. Fils spirituel (en moins extrême toutefois) de l’aîné finlandais, Monolithe a, quant à lui, décidé d’aller jusqu’au bout du concept. 

Le résultat ? Ce premier essai, promis à avoir des descendants ; un bloc pétrifié de 52 minutes impossible à fragmenter, d’où le nom de ce projet derrière lequel se cachent deux membres d’Anthemon, le guitariste Sylvain Bégot et le bassiste Marc Canlers. Le duo est complété par deux autres gratteux et surtout par Richard Loudin, le chanteur à la voix ténébreuse de Despond et Nydwind. Monolithique dans la forme, ce disque l’est aussi dans le fond, le groupe délivrant un Doom funéraire abyssal, sorte de plongeon sans fin dans l’inconnu le plus indicible. Les Français sculptent des ambiances noires et suicidaires qui recouvrent d’une couche opaque ce pavé qu’aucune lumière ne vient jamais caresser. Aucune balise à l’horizon non plus à laquelle se raccrocher, si ce n’est la (timide) progression presque salvatrice et d’une terrifiante beauté qui monte crescendo et explose au bout d’une trentaine de minutes. Pas de titre, des paroles scandées d’une manière irrégulière ; il ne reste donc plus en définitive que la musique comme unique vecteur de reconnaissance. Monolithe est donc un album et un groupe peu accessible. Mais le Doom est un genre exigeant ; il est une religion austère et sévère et ses adorateurs savent qu’elle ne se méritent que par l’effort et par le vécu d’une vie pleine d’aspérités. Un monolithe certes, mais surtout un monument rare et précieux. (17.08.2007) ⍖⍖⍖⍖

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