KröniK | Sula Bassana - Reisen (2023)


Sula Bassana est un musicien toujours très occupé, entre Electric Moon, Zone Six, Interkosmos ou Minerall qu’il vient de monter avec le guitariste de Speck et le batteur de Kombynat Robotron, sans oublier sa carrière solo ! C’est sous son propre nom qu’il publie Reisen en décembre 2023. Le successeur du sympathique Nostalgia (2022) est un album un peu à part au sein de sa discographie en solitaire et ce, au moins pour trois raisons. La première tient au fait qu’il ne se compose que de deux (très) longues pistes de 21 minutes chacune. Si ce format généreux ne lui est pas inhabituel  au sein de ses autres autres groupes, il l’est davantage en solo où, à l’exception de Dark Days (2012), il privilégie une écriture généralement (un peu) plus ramassée même si les morceaux courts n’ont jamais sa préférence. La deuxième raison touche à sa conception morcelée puisque ces deux titres ont respectivement été capturés en 2016 et en 1999. Le second, ‘Helga’s Reise’ a même été enregistré en une nuit, celle du 29 juin pour être précis. Pourquoi cela ? C’est le jour où est décédée sa grand-mère (Helga) qui semble-t-il a eu une grande importance dans sa vie. 


Reise signifie voyage en allemand, au cas particulier, celui des morts lorsqu’ils nous quittent. Cet album est donc conçu comme un requiem, le premier titre, ‘Shushie’s Reise’, étant lui aussi dédié à un être disparu. Corrollaire de cette inspiration mortuaire, l’ambiance est évidemment mélancolique. Ce qui nous conduit à la troisième et dernière raison pour laquelle cette offrande se distingue d’un ensemble d’ordinaire plus léger. Reisen ne brille donc pas par une folle gaieté, hypnotiques, ses deux complaintes répandent une tristesse infinie, lente élévation vers l’inconnu que pilote non pas la guitare du maître mais une myriade de sons électroniques. Farsifa, Moog, Mellotron, boîte à rythme, sequencer et autres synthétiseurs (Yamaha, Korg) confèrent à voyage une texture à la fois spatiale et seventies (Klaus Schulze et Tangerine Dream ne sont bien sûr pas loin). Proche de la transe par ses effluves répétitives, ‘Shushie’s Reise’ vibre d’une beauté fantomatique. Drapé d’un suaire de désespoir, il s’envole pourtant peu à peu, porté par de mécaniques pulsations. Plus space rock, ‘Helga’s Reise’ se pare d’une coloration plus paisible à l’image de celui qui accueille la mort avec sérénité et quiétude. De fait, quoique dramatique et parfois engourdi par les regrets, Reisen sonne finalement d’une manière plus élégiaque que déprimante, long périple aux boucles entêtantes. Il s’agit en tout cas d’une des plus belles réussites de Sula Bassana, tous projets confondus. Douloureux mais tellement sublime.  (14.01.2024) ⍖⍖⍖⍖

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