Bob Fosse - All That Jazz (1979)


L'étiquette comédie musicale sied mal à Que le spectacle commence. S'il y est bien question de musique, la comédie en revanche en est absente. Ou alors sous sa forme la plus noire, la plus grimaçante. Comme le rictus qui doit fendre le visage de la mort. Mais dans All That Jazz, la faucheuse n'est pas repoussante, au contraire, elle épouse la beauté angélique et bienveillante de Jessica Lange dont le funeste personnage dialogue avec Roy Scheider, alter égo de Bob Fosse, danseur, chorégraphe et cinéaste doué, au talent toute en démesure, et qui imagine sa propre mort (prophétique), consumé par le travail et la jouissance. Il s'agit donc plus d'un drame voire d'une tragédie que d'un divertissement léger et badin. Ce qui est d'ailleurs propre aux meilleurs films musicaux qui bien souvent sous le vernis de la comédie cachent en fait une noirceur teintée d'amertume.  De fait et nonobstant la puissance des parties musicales (l'ouverture sur le thème de "On Broadway" de George Benson et surtout le final Bye Bye Love), la force de All That Jazz réside moins dans sa virtuosité chorégraphique, au demeurant démentielle, que dans son portrait sans fard d'un artiste flamboyant.


Bien sûr, le thème du créateur brillant qui s'autodétruit par l'abus de drogue, d'alcool et de femmes n'est pas neuf mais Joe Guideon échappe aux stéréotypes par ses défauts finalement attachants. Certes mauvais père et mauvais mari, il entretient pourtant avec la gent féminine un rapport plus respectueux qu'il n'en l'air, (faux) homme à femmes dont toute l'existence a finalement été guidée, façonnée par elles. Ce n'est pas pour rien que la mort s'incarne à travers les traits séduisants de l'une d'entre elles. Autobiographie folle et débridée, inventive et orgiaque, Que le spectacle commence est porté par un Roy Scheider totalement investi dans un rôle qui compte parmi les meilleurs d'une carrière injustement sous-estimée alors qu'elle aligne, excusez du peu, des joyaux tels que French Connection, Police Puissance 7, Les dents de la mer, Marathon Man, ou Le convoi de la peur ! Palme d'or à Cannes ex aequo avec Kagemusha de Akira Kurosawa, All That Jazz ferme les années 70 dont il est une sorte de chant du cygne, époque de toutes les libertés, de tous les excès. De tous les possibles. (02.01.2023) ⍖⍖⍖


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