Il serait très exagéré de prétendre que le cinéma a perdu en 1978 avec la mort de William Girdler un grand metteur en scène. Tout au plus l’artisan mineur quoique sympathique d’une poignée de petits films d’horreur bon marché (Grizzly, Day Of The Animals). Mais Graham Masterton n’a pas eu la chance de Stephen King dont l’adaptation de Carrie par Brian De Palma a quand même une autre gueule que celle de Manitou que Girlder a commise sous le titre Le faiseur d’épouvantes. Et puis il y a Abby, ersatz ou pastiche (c’est selon) de L’exorciste à la sauce Blacksploitation, ce sous-genre de films bricolés pour les noirs avec des noirs mais par des blancs le plus souvent ! Furieuse, la Warner Bros, qui a produit le chef-d’oeuvre de William Friedkin, accusera Girlder de plagiat. Celui-ci ne s’est pas gêné il est vrai pour piller son modèle, filmant la possession d’une jeune femme par un démon africain qui lui fait vomir des insanités avec une voix bizarre, un stupre blanchâtre plein la bouche.
Le puissant studio gagnera son procès, clouant ainsi la carrière commerciale de cette modeste production qui aura malgré tout engrangé presque trois millions de dollars avant d’être retirée des écrans. Nimbé d’une vague aura culte, Abby n’a pas bonne réputation, il est pourtant moins mauvais qu’on ne le pense. C’est mal joué, pas mieux réalisé avec des champs contre champs foireux. Souffrant d’un budget misérable, ses effets horrifiques se réduisent à quelques masques ridicules, un pauvre poulet qu’on charcute et des meubles qui meubles qui bougent tout seul pour un résultat plus finalement rigolo qu’effrayant à tel point qu’il est permis de se demander si le but du cinéaste n’était pas en fin de compte de parodier L’exorciste plutôt que de le pomper éhontément. Néanmoins, son manque flagrant de moyen et l’interprétation très sexuelle de Carol Speed qui exsude par tous les pores un désir obscène poisse le film d’une ambiance malsaine qui lui donne tout son sel et un charme morbide. (18.08.2023) ⍖
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