Curieuse trajectoire que celle d’Anges de la Mort. Au départ, un premier opuscule gravé en 2019 et édité par les Productions Hérétiques, prometteur dans une veine glaciale et abrasive mais toujours étonnamment accrocheuse. Un mini 2 titres (Where Spirits No More Shine) plus tard et le duo québécois disparaît dans les limbes au point de nous faire redouter un arrêt définitif et ce, d’autant plus que les principaux intéressés doutaient eux-mêmes que le projet survive au-delà de ce galop d’essai aussi encourageant soit-il. A l’arrivée, enfin, Notre tombeau grand ouvert, LP que nous n’attendions presque plus vraiment. Ces années de silence n’ont entamé ni le style en présence ni l’inspiration de la paire Borvos / Ishkar. Le premier demeure toujours taillé dans le bois d’un art noir orthodoxe duquel fait parfois plus qu’affleurer des racines black’n’roll à la Darkthrone (‘La chute des morses’) ou celles d’Immortal (‘Que la glace nous égorge’) avec riffs grésillants et tempo fiévreux qui donnent autant envie de taper du pied que de sucer une bière. La seconde est à l’origine de saillies imparables dont les sales et brutales morsures ou les torrentielles accélérations (‘Les chaînes de la déesse de l’ombre’) ne les exonèrent jamais de cette sève mélodique qui poisse la mémoire et encore moins d’un sens des atmosphères aussi lugubres qu’entêtantes.
La messe file très vite, furieuse et crépusculaire jusqu’à la conclusion qui donne son nom à l’album, surprenante à bien égards, par sa longueur (plus de sept minutes au jus), les arpèges forestiers qui l’introduisent et ses atours épiques franchement plus heavy que black metal. Il est même dommage que les Québécois, dont l'assurance technique est alors incontestable, n’insistent pas davantage sur ce registre rampant qui les voit baguenauder le long d’une sente aux accents sombrement boisés et leur fournit le morceau le plus réussi du lot. Il y aura bien des esprits grincheux pour souligner que nombre de riffs et mélodies possèdent des airs tenaces de déjà-entendu. Mais outre le fait que ce type de black metal, tranchant et teigneux ne se juge pas à l’aune de l’originalité à tout prix, force est de reconnaître à ces Anges de la mort savent distiller une poésie neigeuse grâce la langue de Molière et salir tout l’espace à coup de griffures saignantes. En revanche, si (relatif) reproche il y a à leur faire, c’est qu’ils ne se montrent pas plus généreux de leur semence après quatre années d’abstinence qui auraient du les voir revenir fort d’une turgescence plus chargée que cette (trop) petite quarantaine de minutes. Mais le groupe n’est pas encore ans un tombeau et c’est une bonne nouvelle ! (11.07.2024 | LHN) ⍖⍖⍖
A lire :
L'entretien (04.04.2020)
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