KröniK | Orakle - Tourments & perdition (2008)


Nombreuses sont les faces de clown triste grimées à la truelle chez Leroy Merlin qui aiment à considérer le black metal comme un art élitiste. Si généralement, cette affirmation ne va pas chercher bien loin, assimilant une soi-disant supériorité au culte de l’individualisme, elle peut toutefois en de rares occasions, se révéler pertinente. Du patronyme de ses géniteurs à son visuel inspiré du peintre anglais Turner, précurseur de l’Impressionnisme, de ses paroles très littéraires au choix de recourir pour celles-ci à la langue de Molière, Tourments & perdition, seconde offrande d’Orakle en est une illustration parfaite. Sa pochette, aux formes floues, constitue la porte d’entrée dans un monde intérieur noir et déchiré. Instrumental et empreint d’une profonde gravité, « Tourments » pose le décor. Puis « Les mots de la perte » nous entraîne dans un tourbillon sonore et émotionnel. Les Français y ouvrent les vannes d’un black metal exigent, à la fois dense et tourmenté, mélodique et symphonique. Quoique à ce vocable désormais un brin péjoratif car souvent synonyme de pompeux de bas étage, on préférera employer le terme progressif, moins pour la forme que pour le fond. Un peu à la manière d’un Emperor et plus encore d’un Arcturus, auquel on est bien obligé de penser tant le chant clair d’Archernar retrouve la majesté de celui de Garm, Orakle cisaille le genre afin d’en offrir une relecture personnelle qui s’affranchit des invariants qui le figent. C’est donc en cela que le groupe est progressif. 


Cette approche ne l’empêche pas de libérer une noirceur absolue, que véhiculent des guitares incisives, des nappes de claviers à la funeste beauté et un chant vengeur et désespéré qui résonne comme un cri de rage. Longs et travaillés, les sept plages qui structurent Tourments & perdition, forment l’écrin de paroles d’une grande richesse qui ne se contentent pas de patauger dans un anticléricalisme bas du plafond. Au contraire, elles sont le vecteur d’une introspection douloureuse, d’une souffrance infinie. Les textes de « Celui qui erre », de « Dépossédés (Le miroir sans tain) » ou bien encore de « L’imminence du terrible », nouent en définitive plus de proximité avec la poésie qu’avec de simples paroles de chansons. Après plusieurs démos, deux EPs et un premier essai remarqué il y a trois ans, Orakle démontre avec cette nouvelle œuvre qu’il a réalisé de grands progrès aussi bien en terme d’écriture que de production. Désormais membre de l’écurie Holy Records, label actif bien que modeste, qui lui convient davantage que Melancholia Records, le groupe devrait pouvoir enfin imposer son black metal élaboré et intelligent. C’est tout le mal qu’on lui souhaite. Le quatuor le mérite car Tourments & perdition s’impose comme une des hosties les plus flamboyantes enfantées par l’art noir hexagonal. (22/08/08) ⍖⍖⍖
A lire :
Live Report (09.05.2009)

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