Mai Zetterling - Les amoureux (1964)


Tout d’abord actrice, non pas dans sa Suède natale (à de rares exceptions) mais surtout en Angleterre où elle tourne pour Basil Dearden (Frieda), Terence Fisher (Le mystère du camp 27) ou Cy Endfield (Jet Storm), Mai Zetterling passe à la mise en scène en 1964 avec Les amoureux. Le film est projeté au festival de Cannes dont il choque quelque peu les spectateurs dans sa façon d‘aborder la sexualité, à la suédoise et donc sans tabou. Si nous ne sommes pas loin d’assister à une séquence de masturbation féminine tandis que examens gynécologiques et accouchements sont exposés sans artifice, l’intérêt de Älskande Par réside moins dans ces quelques scènes au réalisme un peu cru que dans son portrait mélancolique de la condition féminine dans la Suède du début du XXème siècle au moment où le pays entre en guerre. Tout du long, oscillant entre passé et présent que lient d’habiles transitions, nous suivons la trajectoire de trois femmes hospitalisées dans une clinique pour y accoucher, avec en filigrane la peinture peu reluisant de la gent masculine. 


Tous les hommes sont au mieux indifférents aux souffrances féminines, blessés dans leur égo de ne pas être le premier, ou pire, pédophile gras et repoussant, esquissés dans toute leur virilité aussi vaniteuse que ridicule. Les femmes, elles ne sont pas tellement heureuses. L’une (Angela), perd sa mère très tôt, teste une homosexualité morbide (sujet ô combien audacieux pour l’époque), une autre (Adèle), connaît le grand amour auprès d’un homme qui l’abandonne et finit par accoucher d’un bébé mort-né, soulageant le père d’un fardeau. La troisième (Agda) semble plus (faussement) joyeuse, échappant de peu à un gros pervers quand elle était gamine avant de devenir le jouet des hommes et d’être engrossée par un gay ! Drapé dans un suaire en noir et blanc d’une beauté froide et sinistre dû au directeur de la photographie de Bergman, Sven Nykvist, Les amoureux peut paraître austère et déprimant mais la cinéaste réussit à ne pas sombrer dans le piège mélodramatique, particulièrement durant une seconde moitié, néanmoins ennuyeuse, qui s’attarde sur une longue partie de campagne. Désenchanté, Les amoureux est un beau film féministe aux images envoûtantes. (08.04.2024) ⍖⍖


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