Vittorio De Sica - A Brief Vacation (1973)


Clara mène une vie morne. La journée, elle travaille à l’usine qui l’épuise inexorablement. Le soir, elle est enfermée dans un appartement miteux où s’entassent son mari qui suite à un accident ne fait plus rien, son beau-frère qui l’espionne, sa belle-mère qui vit à ses crochets et ses trois enfants. Ils regardent sans amour cette femme déjà usée, à la beauté fanée qui semble, à leurs yeux, n’exister que pour les servir. Prisonnière de cette existence sinistre et laborieuse dont l’horizon ne franchit par la frontière blafarde ceinturant la ville, elle est malheureuse. Lorsqu’une tuberculose lui est diagnostiquée, elle est envoyée (contre l’avis de sa famille si aimante) dans un sanatorium niché dans les montagnes au nord du pays, loin de cet environnement déprimant qui la ronge à petit feu. Elle reprend alors goût à la vie au contact de personnes inspirantes qui prennent soin d’elle. Elle redécouvre aussi l’amour le temps d’une idylle salvatrice. A nouveau heureuse et épanouie en tant que femme, elle est enfin heureuse. Mais ce bonheur est de courte durée et, une fois guérie, elle doit retrouver sa famille et sa vie d’avant. Ce séjour aura constitué une parenthèse radieuse, de brèves vacances. 


Pour son avant-dernier film (il mourra l’année suivante peu après avoir tourné Le voyage avec Sophia Loren et Richard Burton), Vittorio De Sica, qui n’a jamais renoncé à ses idéaux communistes, renoue d’une certaine manière avec la fibre sociale et réaliste qui a fait le succès du Voleur de bicyclette (1948) ou de Umberto D. (1952), œuvres matricielles du néoréalisme italien. Si l’opposition entre la ville cafardeuse et la montagne ensoleillée, entre la vie de famille étouffante et la quiétude d’une échappée purificatrice peut sembler schématique, le cinéaste évite de sombrer dans le sordide dans lequel cette histoire menaçait de l’abîmer. Il prend soin de proposer une fin ouverte car l’avenir qu’il tend à son héroïne est incertain. Pour cette dernière qui, au cours de ces quelques semaines, a gagné en détermination et en force de caractère, ce séjour n’aura-t-il été qu’une pause ou bien amorcera-t-il un nouveau départ pour une vie différente ? De Sica ne répond pas à cette question et chacun interprétera comme il le souhaite le retour de Clara dans son giron pluvieux. A Brief Vacation est aussi un film chaleureusement féministe dans le regard qu’il porte sur la sexualité féminine, l’importance qu’il accorde à ce petit groupe de femmes qui se constitue dans l’enceinte du sanatorium et la façon dont la caméra modèle la beauté anguleuse de Florinda Bolkan dont il n’est pas anodin que ce beau rôle lui a été confié, celle-ci n’ayant fait mystère de ses préférences saphiques. Triste et cruel, Una Breve Vacanza est un film injustement méconnu qui mérite absolument d’être (re)découvert. (12.07.2024) ⍖⍖


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