Aesthetics Of A Bullet marque l’unique collaboration entre le réalisateur Sadao Nakajima (A Savage Beast Goes Mad) et le studio ATG, réputé pour privilégier une approche artistique plutôt que commerciale. Ce détail n’est pas anodin car il éclaire sur la teneur singulière de ce film plus curieux qu’il n’en a l’air. De loin en effet, Teppôdama no Bigaku affiche les habits secs et violents du yakuza eiga avec son porte-flingue recruté par une famille qui le missionne pour déclencher un conflit avec un clan rival. Pourtant, dès le générique, rythmé par la musique dure et énergique du groupe de punk rock Brain Police, le ton diffère par rapport aux codes du genre, goguenard et contestataire. On y voit des gens qui bouffent salement tandis que défilent des images de décharges et de clubs de strip-tease.
C’est dans cet environnement crasseux témoin du déclin moral de la société japonaise que vivote Kiyoshi Koike, (anti) héros foireux qui se voit grand alors qu’il n’est qu’un petit. L’intérêt du film réside dans ce personnage méprisable, qui joue les durs mais se révèle incapable de tuer de sang-froid. Il ne se montre pas moins brutal, particulièrement avec les femmes (superbe Miki Sugimoto) qu’il rudoie et besogne avec une violence qui cache mal une évidente impuissance sexuelle, métaphore de sa médiocrité. On n’arrive pourtant pas à le détester totalement, fanfaron pathétique enferré dans une situation qui peu à peu lui échappe et dont il ne pourra sortir vivant, abattu non par des yakuzas mais par la police, au terme d’un affrontement plus minable que flamboyant. En cela, vidé de séquences spectaculaires, Aesthetics Of A Bullet s’inscrit pleinement dans le renouveau du yakuza eiga qui dans les années 70 rompt avec la vision héroïque des samouraïs. Il en découle une œuvre étrange que tâche un désespoir teinté d’ironie. (20.11.2024) ⍖⍖
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