Charles Crichton - De l'or en barres (1951)

Bien que moins réussi que Noblesse oblige (1949) de Robert Hamer ou Tueurs de dames (1955) de Alexander Mackendrick, De l'or en barres (qu'il ne faut évidemment pas confondre en français avec L'or se barre de Peter Collinson !) n'en demeure pas moins un des fleurons de la comédie anglaise de l'âge d'or à laquelle sont associés les fameux studios Ealing qui l'a produit entre Passeport pour Pimlico (1949) de Henry Cornelius, Whisky à gogo (1949) ou L'homme au complet blanc (1951), tous les deux signés Mackendrick. On retrouve outre Stanley Holloway, l'immense Alec Guinness, acteur emblématique de cette véritable AOC. Chapeau melon, costume étriqué et lunettes derrière lesquelles brillent de malicieuses prunelles, il est savoureux dans la peau de ce petit banquier besogneux et socialement invisible qui fomente le vol ingénieux de lingots d'or. Par sa mécanique gestuelle et cette façon qu'il a de mêler l'insignifiant à la malice, son interprétation est délicieuse et le film lui doit beaucoup. 

Certes peu spectaculaire, le braquage du fourgon est néanmoins emballé avec ce flegme typiquement british qui ne l'exonère pourtant pas d'une minutie d'orfèvre qu'un grain viendra toutefois gripper mais trop. Charles Crichton (Tortillard pour Titfield et plus tard Un poisson nommé Wanda)  imprime un rythme qui se veut de plus en plus frénétique. Cela commence avec la traque des petites Anglaises auxquelles ont été vendues par erreur des Tours Effel coulées dans l'or puis culmine lors d'une étonnante poursuite en voitures dans les rues de Londres - exercice que le film détourne avec humour et imagination - voyant Guinness et Holloway multiplier les stratagèmes pour fuir et tromper la police. Le résultat se révèle tout du long aussi savoureux que jubilatoire auquel toutefois un ton plus grinçant et une fin moins moralisatrice auraient très certainement conféré plus de force et une autre dimension par conséquent. A noter les apparitions furtives de Audrey Hepburn (déjà superbe d'élégance) et Robert Shaw (à peine reconnaissable). (26.07.2023) ⍖⍖⍖