KröniK | No-Man - Schoolyard Ghosts (2008)


Porcupine Tree et, dans une moindre mesure, Blackfield, servent de vitrine au talent, aujourd’hui reconnu par tous (ce ne fut pas toujours le cas), de Steven Wilson. Dans l’ombre, le stakhanoviste cultive en parallèle plusieurs jardins secrets. Si parmi ceux-ci, l’aride Bass Communion lui permet d’assouvir sa soif d’expérimentations et de recherches, No-Man est une porte sur son cœur. Pour ceux qui ne le connaissent pas, sachez qu’il s’agit d’un duo que le musicien forme depuis les années 80 avec le chanteur Tim Bowness. Bien loin du rock (metal) progressif avec lequel il ne noue en réalité aucun lien, le groupe façonne un rock feutré intimiste et émotionnel. Aucune considération commerciale ne le guidant, il publie des albums quand ses deux géniteurs décident qu’il s’agit du bon moment. Chez eux, un nouvel opus n’est jamais un opus de plus. C’est pourquoi, hormis une copieuse compilation (Of All The Blues Changes), le délicat Together, We’re A Strangers demeurait depuis 2003 le dernier jalon de leur carrière. Pourtant, alors que Wilson n’a sans doute jamais été aussi occupé, le tandem trouve le temps d’offrir ce Schoolyard Ghosts aussi miraculeux que miraculé. On aurait pu penser que sa qualité pourrait pâtir de l’hyper activité du guitariste. L’homme n’a pas pour habitude de bâcler son travail : il n’en est donc rien. Plus mélancolique que jamais, No-Man a cette fois-ci sculpté huit chansons irriguées par des ambiances spectrales. 


Dès l’introductif, « All Sweet Things », nous sommes happés par la voix de Bowness, accompagné par des chœurs fantomatiques qui résonnent comme un écho du passé. Cette voix. Suave, fragile et d’une tristesse absolue que la musique, par petites touches impressionnistes soulignent avec élégance ; ce vecteur d’émotions à fleur de peau sur lequel s’arc-boute la palette sonore faussement dépouillée car toujours enrichie par l’apport de divers instruments (harmonium, percussions, violon…) dirigée par Wilson. Après le fin « Beautiful Songs You Should No », Schoolyard Ghosts dévoile le cœur de son épicentre avec le tragique « Pigeon Drummer », rythmé par les percussions de Pat Mastelotto que les amoureux de King Crimson connaissent bien, pulsation désespéré et obsédante qui quand elle explose confine à un cri d’abandon et de douleur ; et plus encore avec « Truenorth », qui après une première partie égrenée par des notes de piano squelettiques, s’élève, s’envole peu à peu vers des terres aux couleurs seventies (la flûte de Theo Travis y est pour beaucoup), long voyage introspectif dont la mélancolie se meut progressivement en un bonheur timide. Puis, au contemplatif et apaisé « Wherever These Is Light » succède l’aérien « Song Of The Surf », vagues d’émotions au final illuminé par un Steven Wilson discret mais jamais effacé, tandis que « Streaming » est porté par le chant habité de Tim Bowness. Schoolyard Ghosts meure sur le désincarné « Mixtaped », lente plainte diaphane à la touchante fébrilité. No-Man est l’écrin de deux talents dont l’union donne naissance encore une fois à un joyau d’une rare beauté.(22.07.2008) ⍖⍖⍖

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