KröniK | Sophia - The Age Of The Narcissist (2024)


Peu après avoir participé à une seconde collaboration avec Empusae (Onus) que nous n’attendions pas, c’est un autre de ses projets qu’on croyait presque enterré que Peter Bjärgö ressuscite et pas des moindres : Sophia. Mais il est vrai que depuis quasiment vingt ans et Deconstuction Of The World (2003), celui qui incarne en quelque sorte la face noire de l’œuvre du Suédois ne surgit des limbes qu’à intervalles très irréguliers puisque déjà Unclean en 2016 semblait lui venir de nulle part et marquer un point final. C’était sans compter sur le caractère imprévisible de cette figure tutélaire des musiques sombres qui, sans doute déprimé par le monde qui l’entoure et par le comportement des hommes, a ressenti à nouveau le besoin de capturer ce que lui inspire les temps anxiogènes que nous vivons. Comme toujours, Sophia se veut le réceptacle de ses peurs, de ses doutes, de ses colères probablement aussi. On reconnaît évidemment la signature du Scandinave qui n’a pas son pareil pour marteler de sévères pulsations (‘Hunt/Hung’), pour explorer les arcanes de lieux désolés (‘Mouth Of Mammon’), pour épandre un climat aussi hypnotique que menaçant (‘What’s Wrong With People’), autant de balises que surplombe sa voix reconnaissable entre mille même dans un registre murmuré et oppressant (‘Closer To The Graves’). 


Pour autant, s’il ne décevra pas, fidèle aux standards de qualité et d’inspiration de son créateur, le fait est que The Age Of The Narcissist ne renoue jamais vraiment avec la noirceur autoritaire d’un Herbstwerk (2001) par exemple. Plus accessible, ce nouveau signe de mort porte ainsi les stigmates des explorations plus récentes de Bjärgö, en solitaire plus particulièrement, tout en ambivalences éthérées, ce dont témoigne en premier lieu le travail percussif, superbe, qui donne son pouls entêtant à l’album. Moins extrême que ses plus lointains prédécesseurs, encore que sa seconde partie affiche une dureté martiale comme un prélude au conflit (‘Eyes For An Eye’), cet opus développe un son, des textures qui lui sont propres, soulignant le soin apporté aux voix, masculines ou féminines (celles de son épouse), lesquelles trempent dans une marée noire qui poissent toutes les parois d’une écoute aussi puissante qu’immersive. Alors que nous ne l’attendions pas (plus) dans ce registre industriel, Peter Bjärgö redonne vie (?) à Sophia, écorché ambient et pulsatif de son amertume face à une humanité au bord de l’apocalypse...  (30.07.2024) ⍖⍖⍖

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