Mario Bava - Baron vampire (1972)


Malgré les succès de Danger : Diabolik (1968) et de La baie sanglante (1971), que d’aucuns considèrent comme l’ancêtre des slashers, la carrière de Mario Bava prend un tour chaotique à partir de la fin des années 60 alors même qu’il n’a alors jamais autant tourné. Sympathique au demeurant, Roy Cold et Winchester Jack (1970) confirme que le western lui sied mal, Une hache pour la lune de miel (1970) souffre d’un tournage confus et Une nuit mouvementée (1971) devra patienter trois ans avant de sortir sur les écrans, plus ou moins renié par son auteur au surplus. Marquant un retour à l’épouvante, genre auquel il a offert quelques uns de ses meilleurs efforts (Le masque du démon, Le corps et le fouet…), Baron vampire s’inscrit dans ce contexte de déclin commercial pour le cinéaste qui ne semble pas avoir accepté de le réaliser avec un grand enthousiasme.  Il s’agit pourtant d’un grand film oublié qui déplace habilement l’horreur gothique, jusque là associée aux XVIIème ou XIXème siècles, dans un cadre contemporain, le château autrichien de Kreuzenstein se dressant comme un passage entre le passé et le présent. Qui plus est, initiateur du genre avec La fille qui en savait trop (1963), Bava y injecte une touche de giallo à travers les meurtres exécutés par le baron dont le visage semble inhumain. 


La blondeur de Elke Sommer qui mène l’enquête avec le descendant de von Kleist ajoute une touche hitchcockienne à un récit qui certes n’innove pas mais joue avec intelligence des codes du cinéma fantastique. De fait et nonobstant les jupes courtes que porte la craquante Allemande et le plaisir de retrouver Joseph Cotten alors condamné à hanter des pellicules horrifiques de série B (au mieux), parfois cultes néanmoins (L’abominable Dr. Phibes), Baron vampire doit toute sa valeur au travail de Mario Bava qui utilise à merveille les intérieurs du château, ses couloirs étirés, son architecture baroque, grâce à des cadrages et angles biscornus accouplés à l’usage de longues focales et une photographie toute en contraste. Et la traque nocturne d’Eva par le baron est à la fois un grand moment de cinéma et l’illustration de l’immuable maîtrise de Bava pour le suspense et l’horreur. Il croit à cette histoire de réincarnation et nous aussi. Il en découle un pur exercice de style, tout en atmosphère morbide et fascinante, qui renvoie à leurs chères études tous les autres artisans du bis italien. Enfin, il serait regrettable de ne pas évoquer Rada Rassimov (la sœur d’Ivan) dont la courte participation en médium, n’en reste pas moins marquante. Champ du cygne de l’horreur gothique par le saigneur du genre, Baron vampire possède une force d’évocation rare qui explique pourquoi, malgré une stature modeste, il s’incruste durablement dans la mémoire.  (18.11.2024) ⍖⍖⍖


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