CinéZone | Clint Eastwood - Mémoires de nos pères (2006)


Après Créance de sang (Michael Connelly), Mystic River (Dennis Lehane) et Million Dollar Baby (F.X. Toole), Clint Eastwood choisit à nouveau d'adapter un livre de James Bradley qui raconte l'histoire de la célèbre photo de Joe Rosenthal immortalisant des soldats américains en train de planter la Bannière Etoilée au sommet du Mont Suribashi lors de la bataille d'Iwo Jima, parmi lesquels figurait le propre père de l'auteur. Si Steven Spielberg, qui la produite, est intéressé par l'adaptation, Clint y trouve pourtant un sujet selon son coeur. A quelques années près, il aurait pu être un de ces gamins envoyés se battre. Encore une fois, le film n'est pas ce qu'il a l'air d'être, n'empruntant pas la direction supposée. De fait, il est moins un métrage guerrier, même si les séquences de l'assaut de cette île du Pacifique sont très réussies, qu'une réflexion sur la notion d'héroïsme, fil d'Ariane d'une bonne partie de son oeuvre, de Impitoyable à Sully en passant par American Sniper. A la fois classique, proche en cela de John Ford (L'homme qui tua Liberty Valence), Raoul Walsh (Aventures en Birmanie) ou William Wyler (Les plus belles de notre vie), Mémoires de nos pères ne noue cependant aucun lien avec la vision manichéenne d'un John Wayne et de son Iwo Jima réalisé par Allan Dwan. 

Eastwood montre l'envers du décor, celle d'une Amérique qui instrumentalise l'héroïsme avant d'abandonner ces jeunes qui ne sont pas des héros mais seulement des hommes qui ont tenté de survivre. La bataille est  montrée dans toute sa brutalité. Les comédiens, déjà peu charismatiques, finissent par se confondre les uns les autres au milieu des cadavres, face à un ennemi invisible. A cette boucherie répond la suggestion de moments tragiques où la violence si elle n'est pas à l'écran, n'en demeure pas moins palpable et insoutenable, comme lorsque John Bradley découvre la dépouille de celui qui le hantera pour toujours. Avec l'aide de ses scénaristes dont Paul Haggis (Million Dollar Baby), Eastwood opte pour un récit fragmenté, morcelé dans le temps qui a cependant pour résultat de vider le film de sa tension, de son suspense. Mais, contemplatif, Flags Of Our Fathers est un film sur la transmission, sujet cher au metteur en scène, plutôt qu'une dénonciation de la guerre. Ample et intimiste à la fois,  parfaitement interprété par de jeunes acteurs tels que Ryan Philippe, Jamie Bell, Barry Pepper et même le regretté Paul Walker, bénéficiant de la phot cendreuse de Tom Stern, le film déçoit pourtant quelque peu, ne réussissant jamais à susciter l'émotion sinon l'empathie. Mais il forme avec son frère jumeau, Lettres d'Iwo Jima, qui le surclasse largement, un diptyque unique et passionnant. (12.03.2017) ⍖⍖






 

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