CinéZone | Anthony Mann - Winchester '73 (1950)


Anthony Mann a dirigé huit fois James Stewart entre 1950 et 1955. Parmi ces films, cinq sont des westerns. Premier d'entre eux, Winchester '73 scelle cette fructueuse collaboration. En ce sens, il est un jalon important dans la carrière respective du réalisateur et du comédien tout leur ouvrant cette voie westernienne dont ils compteront parmi les figures majeures du genre dans les années 50 après s'être fait la main dans le polar pour le premier (Marché de brutes, La rue de la mort) tandis que le second cherchait alors à sortir des rôles positifs qui ont fait sa gloire dans les comédies de Frank Capra (Monsieur Smith au sénat) et les films policiers de Henry Hathaway (Appelez Nord 777) ou d'Alfred Hitchcock (La corde). Des cinq westerns nés de cette alliance, Winchester '73 n'est pas celui que les cinéphiles citent généralement comme étant leur préféré. Les affameurs (1952) et surtout L'appât (1953) trônent davantage au sommet de cette association en particulier et du genre en général. Le recours au noir et blanc, qui lui confère cette patine aride, rocailleuse sinon ascétique, des méchants qui ne sont pas plus que cela, au demeurant superbement incarnés par Stephen McNally et Dan Duryea (nous y reviendrons), mais moins profonds dans tous les cas que dans les quatre bobines à venir, expliquent peut-être pourquoi il a moins les faveurs des spécialistes du genre. 


C'est pourtant un western d'une grande richesse, tant dans son scénario que dans sa réalisation ou son interprétation. Inspirée du livre de Stuart N. Lake, Big Gun, l'histoire s'accroche à une carabine Winchester qui passe de main en main jusqu'à ce qu'elle retrouve son propriétaire légitime en une trame circulaire. Inscrit dans la mythologie de l'Ouest (Wyatt Earp, Custer, Little Big Horn...), ce récit aussi simple qu'ingénieux se double d'une quête vengeresse, thème classique qui forme également le socle des Affameurs ou de L'appât. Lin McAdam poursuit de manière obsessionnel le vilain Dutch Henry Brown. Mais quel contentieux les oppose ? Les dernières minutes révèleront enfin le lien familial qui unit les deux hommes - ils sont frères - et la raison de cette traque, le second ayant abattu (dans le dos !) leur père. Sèche et nerveuse, la mise en scène d'Anthony Mann se nourrit autant de l'aridité de la topographie que de la rudesse des personnages, comme l'illustre l'affrontement final vers lequel tend tout le récit et dont les protagonistes qui se confondent avec la roche abrupte de la montagne. Les acteurs enfin sont tous remarquables. James Stewart bien sûr alors même qu'il s'absente un bon moment de l'écran mais aussi toutes les gueules nous font tant aimer le cinéma américain de cette époque, de John McIntire à Millard Mitchell, de Jay C. Flippen à Dan Duryea qui se régale dans la peau de ce bandit gouailleur. Sans oublier Shelley Winters et les débutants Rock Hudson (en Indien !) et Tony Curtis. Par sa concision, son épure et à la psychologie tourmentée de ses personnages, Winchester '73 marque une étape essentielle dans l'historie du western qu'il renouvelle brillamment et pose les bases des chefs-d'œuvre à venir du tandem Anthony Mann / James Stewart. (11.03.2023) ⍖⍖⍖


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