Val Guest - Un homme pour le bagne (1960)


On a tendance à l’oublier mais la Hammer n’a pas produit que des films d’horreur, comme nous le rappelle Un homme pour le bagne, polar dans la pure tradition britannique que signe Val Guest, réalisateur maison de quelques classiques, bien fantastiques ceux-là, du célèbre studio de Michael Carreras, des deux premiers Quatermass (Le monstre puis La marque) au Redoutable homme des neiges avec Peter Cushing. Moins fameux que son cousin américain, le film noir anglais est pourtant à bien des égards très intéressant, doté d’une identité qui lui est propre, authentique et sociale. Du Gang des tueurs (1947) de John Boulting aux Criminels (1960) de Joseph Losey, de La loi du milieu (1971) de Mike Hodges à La cible hurlante ( 1972) de Douglas Hickox, le genre est riche de nombreuses pépites qui traduisent son évolution. Hell is The City a toute sa place parmi les fleurons du british noir. Val Guest adapte la première enquête de l’inspecteur Martineau imaginé par Maurice Procter. Le film déplace le récit de la ville fictive de Granchester à Manchester, son évident modèle, dont la caméra, au gré de la traque du criminel, sillonne les rues pavées, pénètre les pubs populeux et enfumés avec un pittoresque toutefois très éloigné de la vision infernale (d’où le titre original) décrite par les romans. 


Ce Manchester des années 50 et la lande battue par les vents créent néanmoins cette ambiance un peu austère typique du cinéma anglais de l’époque auquel elle confère une bonne partie de son charme sinistre. La photographie au noir et blanc profond de Arthur Grant n’est pas étrangère à cette atmosphère fascinante, laquelle fournit au réalisateur l’idéal et sombre écrin à sa mise en scène nerveuse qui culmine lors de l’affrontement entre le méchant et une sourde et muette, prélude au final anthologique sur les toits de la ville. Evidemment, la force de Hell is The City repose par ailleurs beaucoup sur Stanley Baker dont la carcasse robuste et le visage rugueux de mineur de fond cache toujours ce mélange qui n’appartient qu’à lui de virilité puissante et de tristesse amère. Il habite ce rôle taillé pour lui de flic acharné qui trouve dans son métier l’exécutoire d’une vie personnelle ratée. A ses côtés, Donald Pleasence excelle dans un registre louche, la très jolie Sarah Branch nous fait regretter une carrière trop vite écourtée (on la reverra la même année dans Sands Of The Desert et surtout Le serment de Robin des Bois) tandis qu’on est tout étonné de retrouver John Crawford, le futur maire de San Francisco dans L’inspecteur ne renonce jamais (!) en criminel franchement teigneux. A l’arrivée, cet ensemble dicte un des meilleurs polars anglais des années 50/60, pas le plus noir mais un des plus vigoureux et visuellement élaborés. (14.08.2024) ⍖⍖⍖

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