Auteur prolifique auquel on doit les scénarios de quelques polars (La cité de la violence de Sollima, Un homme appelé karaté de Tarantini) mais surtout de quelques uns des meilleurs giallos, notamment pour Sergio Martino (La queue du scorpion, Ton vice est une chambre close dont moi seul ai la clé, Toutes les couleurs du vice), Sauro Scavolini ne réalise qu’un seul film pour le grand écran : Amour et mort dans le jardin des dieux. Au vu du résultat, on ne peut que le regretter. Exploitée en salles avec une certaine indifférence à l’instar de bon nombre d’autres bobines italiennes qui ne bénéficiaient alors pas d’une grande considération, cette œuvre précieuse fait honneur à son très beau titre qui évoque le mythe d’Eros et Thanatos. Identifiée comme un giallo, elle en dégage certes l’arôme à la fois morbide et sensuel mais par son rythme lancinant et bucolique, elle s’en échappe néanmoins, labyrinthe feuillu aux confins de plusieurs genres. Dès les premières images, l’envoûtement opère. On y suit une jeune femme (la ravissante Orchidea de Santis) s’aventurer dans une demeure avalée par une luxuriante végétation où elle finit par découvrir le cadavre d’une femme nue dans une baignoire (Erika Blanc). Celle-ci semble s’être suicidée. Mais est-ce vraiment le cas ? Et pour quelle raisons ?
Après le générique, on retrouve cette maison, cette fois-ci occupée par un vieil ornithologue. Un jour, il trouve, cachée dans le jardin, une bande magnétique toute chiffonnée. Il s’agit des confidences de Azzurra, la femme dans la baignoire dont on va feuilleter la vie par petits morceaux jusqu’au drame. Par cette enquête sous forme de puzzle, il y a évidemment beaucoup du Blow Up de Antonioni dans Amour et mort dans le jardin des dieux mais Scavolini, rompu au style giallesque, n’en fournit pas moins un travail très personnel. Visuellement, le film est magnifique, alternant les focales petites ou grandes, utilisant le cadre verdoyant d’une Italie presque archaïque pour distiller un climat teinté d’étrangeté et d’un érotisme pervers mêlant inceste et saphisme. Il offre à Erika Blanc et à Peter Lee Lawrence un de leurs rôles les plus marquants de leur carrière, la première tout en fantasmes refoulés, le second, loin des personnages westerniens qui ont fait son succès, fiévreux et tourmenté dans une de ses dernières apparitions avant d’être emporté deux ans plus tard par une tumeur au cerveau à l’âge de trente ans. S’il ne saurait être considéré comme un chef-d’œuvre méconnu, Amour et mort dans le jardin des dieux fascine néanmoins par son atmosphère mystérieuse et charnelle qui nait autant de son cadre romantique (au sens littéraire du terme) presque hors du temps que de son érotisme trouble. (30.04.2024) ⍖⍖⍖
Commentaires
Enregistrer un commentaire