John Wayne s’est associé à trois reprises (quatre si l’on prend en compte Adieu Lady qu’il s’est contenté de produire) avec William Wellman. Si cette collaboration n’a enfanté aucune œuvre majeure contrairement à celles qui ont uni l’acteur avec John Ford ou Howard Hawks, Aventure dans le Grand Nord (1953), Ecrit dans le ciel (1954) et L’allée sanglante (1955) ne sont toutefois pas sans intérêt. Plutôt méconnu autant dans la carrière de Wayne que de Wellman, le premier d’entre eux se révèle même assez curieux en cela qu’il porte finalement davantage la marque du cinéaste que du comédien, pourtant producteur. Celui-ci est le capitaine Dooley, pilote émérite contraint de poser en catastrophe dans la froide hostilité des rudes étendues du Labrador, le C-47 qu’il pilote pour le compte d’une compagnie de transport de fret. Le Duke est certes le héros mais contre toute attente, Wellman n’en fait pas un surhomme. Il n’est pas même tellement présent à l’écran, presque sacrifié au détriment des équipes chargées de le retrouver lui et ses hommes, perdus dans ce Grand Nord que le brouillard rend plus inhospitalier encore. Car chez l’auteur des Forçats de la gloire, le courage d’un seul importe moins que la bravoure et la solidarité du groupe, à l’image de son admirable Convoi de femmes (1951). De fait, le film s’attarde autant sur la difficile survie de l’équipage du C-47, que menacent les conditions climatiques, la nature sauvage et le manque de nourriture que sur les pilotes débauchés pour les sauver.
Là réside sans doute la relative faiblesse de Island In The Sky qui aurait gagné en force dramatique et en suspense s’il s’était au contraire resserré autour des survivants, plutôt que de s’accrocher aussi longuement à leurs sauveteurs, au demeurant parfaitement incarnés par de solides seconds rôles (Lloyd Nolan, Andy Devine, James Arness…). Le recours à une voix off, un peu trop solennelle par surcroît, encombre qui plus est le film en le vidant d’une part de son efficacité. Mais, cinéaste des géographies arides (La ville abandonnée) ou neigeuses (L’appel de la forêt voire, dans une moindre mesure, Bastogne ) et ancien pilote lui-même, expérience qui a tout du long nourri son cinéma, de Pilotes de chasse (1942) à Escadrille Lafayette (1958), Wellman sait aussi bien capter la tension d’un cockpit que saisir la morsure du froid et la beauté à la fois silencieuse et hostile de ces vastes contrées que drape un linceul d’une pureté virginale. A un sujet d’une grande banalité, il parvient ainsi à insuffler son humanité, à poser sa griffe où la psychologie des personnages prime sur l’action. Ce qui confère à Aventure dans le Grand Nord son identité mais, œuvre en définitive quelque peu décevante, ne suffit néanmoins pas à transcender un matériau qui manque de consistance. Reste qu’il est agréable d’admirer John Wayne dans un environnement à la fois non westernien et propice à révéler ses failles, loin du monolithisme que ses détracteurs lui prêtent à tort. (02.09.2024) ⍖⍖
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